Le 23 septembre 2008, la Cour de Cassation a rendu une décision très favorable aux associés qui ont choisi de se répartir une partie de l’actif social à la suite d’une opération de réduction de capital en cours de vie sociale. Cette décision est relative à l’applicabilité du droit de partage de 1,10%. En l’espèce, il s’agissait en effet de savoir si une réduction de capital (deux en l’occurrence) par réduction du nominal des titres d’une société était susceptible ou non, d’être constitutive d’un partage. Etant alors assujetti, à ce titre, au droit de partage actuellement fixé au taux de 1,10 % prévu par les articles 635-7 et 746 du Code général des impôts (CGI).
L’article 635-7 du CGI dispose en effet que doivent être enregistrés dans le délai d’un mois « les actes constatant un partage de biens à quelque titre que ce soit », tandis que l’article 746 du même code dispose que « les partages de biens meubles et immeubles entre copropriétaires, cohéritiers et coassociés, à quelque titre que ce soit, pourvu qu’il en soit justifié, sont assujettis à un droit d’enregistrement ou à une taxe de publicité foncière de 1,10 % ». L’application combinée des deux articles ne permettait toutefois pas d’appréhender de manière précise la notion de partage.
Sur le plan technique, rappelons qu’il est possible pour réduire son capital, soit de diminuer le nombre de droits sociaux détenus par chacun des associés, soit d’abaisser la valeur de ces titres. Cette opération a été souvent utilisée pour combler les pertes d’une société en affectant une partie de ce capital à leur paiement. Lorsque la réduction du capital n’est pas motivée par des pertes, notamment pour permettre l’entrée de nouveaux associés, les sommes dégagées par cette opération peuvent être réparties entre les associés.
Jusqu’à présent, l’administration fiscale a toujours considéré que les réductions de capital opérées par répartition au profit de tous les associés d’une fraction de valeurs sociales s’analysaient en un partage partiel, soumis au même régime fiscal que les partages de sociétés et donnaient ouverture au droit de partage. (Doc. Adm. 7 H-331, § 4 et 5, 1er sept 1999). Cette décision attendue a donc l’immense mérite de mettre un terme à plus de 10 ans de débats et de controverses dans le sens où, malgré des arrêts de Cour d’appel favorables aux contribuables (Cour d’appel de Lyon 23 janvier 2005, n° 04-2540 et Cour d’appel de Paris 22 décembre 2006, n° 04-24674), l’administration fiscale continuait à appliquer le droit de 1,10% sur le montant de la réduction de capital.
Dans sa décision précitée du 23 septembre 2008, la Cour de Cassation en a donc décidé autrement. Selon la Haute Juridiction, le droit de partage n’est pas dû tant que la réduction de capital intervient en cours de vie sociale et n’entraîne pas la disparition de la société. Dans cette hypothèse, seul un droit fixe de 125 € demeure exigible. Ainsi, et pour déterminer ce qu’est un partage de bien, la Cour de cassation s’est référée à l’article 1844-9 du Code civil. Sans définir expressément la notion de partage d’actif social, l’article 1844-9 du Code civil laisse cependant sous-entendre que ce dernier ne peut avoir lieu qu’après la clôture de la liquidation et non lors d’une réduction de capital. Il énonce en effet qu’« après paiement des dettes et remboursement du capital social, le partage de l’actif est effectué entre les associés dans les mêmes proportions que leur participation aux bénéfices, sauf clause ou convention contraire. Les règles concernant le partage des successions, y compris l’attribution préférentielle, s’appliquent aux partages entre associés ».
Ainsi, et en l’absence de volonté expresse des associés de liquider la société, ces derniers peuvent se répartir une partie du capital sans avoir à acquitter le droit de partage de 1,10 %.
Il faut donc saluer cette clarification de la Cour suprême. Sur le plan pratique, il est désormais impératif de spécifier expressément dans l’acte concerné, qu’en cas de réduction de capital, les associés n’entendent pas liquider la société.
Cass Commerciale 23 septembre 2008 n°07-12.493.
Gauthier d’HELLENCOURT
Avocat