EXONERATION DES PLUS VALUES REALISEES EN CAS DE TRANSMISSION D’UNE ENTREPRISE INDIVIDUELLE OU D’UNE BRANCHE D’ACTIVITE : PERENNISATION ET ELARGISSEMENT DU DISPOSITIF

Un nouveau régime d’exonération des plus values professionnelles a été institué par la loi de finances rectificative pour 2005, en cas de transmission d’une entreprise individuelle, d’une branche complète d’activité ou d’éléments assimilés à une branche complète d’activité (article 34 ; CGI article 238 quindecies nouveau).

Ce nouveau régime, applicable aux transmissions réalisées à compter du 1er janvier 2006, pérennise et renforce le dispositif antérieur tout en élargissant très largement son champ d’application. Cette extension vise aussi bien les contribuables concernés et la nature de l’activité exercée que le type d’opérations réalisées et la nature des éléments transmis.

Ce nouveau dispositif succède au régime temporaire institué par la loi pour le soutien de la consommation et de l’investissement, dont le terme légal a été fixé au 31 décembre 2005 et qui exonérait les plus values de cession à titre onéreux d’une branche complète d’activité comprenant un fonds de commerce ou une clientèle soumis aux droits d’enregistrement d’une valeur au plus égale à 300.000 euros.

 

Quels sont les contribuables concernés ?

 

Le nouveau régime d’exonération s’applique aux plus values réalisées dans le cadre d’une activité commerciale, industrielle, libérale ou agricole (jusqu’alors exclue de la mesure de faveur). Il concerne :

  • les entreprises individuelles relevant du régime des BIC, des BNC ou des BA ;
  • les contribuables qui exercent leur activité professionnelle dans une entreprise relevant de l’impôt sur le revenu et dont les bénéfices sont imposés à leur nom en tant que BIC, BNC ou BA ;
  • les sociétés soumises à l’impôt sur les sociétés. Toutefois, et pour bénéficier de cette exonération, ces sociétés doivent cumulativement employer moins de 250 salariés et avoir réalisé un chiffre d’affaires annuel inférieur à 50 M€ ou avoir un total de bilan inférieur à 43 M€ et leur capital ou leurs droits de vote ne doivent pas être détenu à hauteur de 25% ou plus, par une entreprise ou par plusieurs entreprises ne remplissant pas les conditions de salariés et de chiffre d’affaires ou de total du bilan.
  • Les organismes sans but lucratif exerçant des activités lucratives, les collectivités territoriales, EPCI ou un de leurs établissements publics réalisant des opérations lucratives.

 

Quelles sont les opérations concernées ?

 

Sont concernées par ce nouveau régime, toutes les transmissions d’entreprises individuelles ou de branche complète d’activité. Selon l’administration fiscale, il convient de rappeler que constitue une branche complète d’activité l’ensemble des éléments d’actif et de passif d’une division d’entreprise ou d’une société, qui constituent du point de vue de l’organisation, une exploitation autonome, c’est à dire un ensemble capable de fonctionner par ses propres moyens.

Sont également concernées par ce nouveau régime, la transmission d’un ensemble de titres constituant un actif professionnel. Ces titres peuvent ainsi être assimilés à une branche complète d’activité, permettant de ce fait aux contribuables qui exercent leur activité professionnelle dans une société soumise au régime fiscal des sociétés de personnes de bénéficier de l’exonération en cas de transmission de leurs parts, à condition qu’ils transmettent l’intégralité des droits ou parts qu’ils détiennent. A l’issue de cette opération, l’associé devra de surcroît cesser son activité professionnelle dans le cadre de la société dont il a transmis les titres.  Cette extension de la mesure d’exonération aux transmissions de parts de sociétés de personnes détenues par les exploitants y exerçant leur activité, constitue d’ailleurs l’une des plus importantes nouveautés du présent dispositif.

 

Par dérogation au principe d’exclusion des actifs immobiliers, l’exonération totale ou partielle s’applique également aux plus values réalisées sur les titres de sociétés professionnelles à prépondérance immobilière dont l’actif est principalement constitué de biens immobiliers (ou de parts de sociétés dont l’actif est principalement constitué de ces mêmes biens, droits ou parts) affectés par la société à sa propre exploitation.

 

Existe t-il une condition de durée d’exercice de l’activité afin de bénéficier de cette exonération ?

 

Ce nouveau régime bénéficie aux activités commerciales, industrielles, artisanales, libérales ou agricoles exercées pendant au moins 5 ans à la date de leur transmission. Il s’agit là d’une nouvelle condition d’application de la mesure d’exonération.

 

Quels sont les seuils d’exonération ?

 

Ces nouvelles dispositions instituent un double régime d’exonération :

– une exonération totale lorsque la valeur des éléments transmis est inférieure ou égale à 300.000 euros (ce seuil étant le même que celui de l’ancien dispositif),

– une exonération dégressive lorsque la valeur de ces éléments est comprise entre 300.000 euros et 500.000 euros (il s‘agit là encore d’une nouveauté importante du présent dispositif).

 

Ce mécanisme d’exonération dégressive définit ainsi, à partir de la valeur des éléments transmis, un taux d’exonération à appliquer aux plus values de transmission. Ce taux est calculé comme suit : (500.000 – valeur des éléments transmis) / 200.000. Ce taux d’exonération est donc dégressif, de façon linéaire, à l’intérieur des seuils fixés par la loi, de 100% pour une valeur égale à 300.000 euros à 0% pour une valeur de 500.000 euros.

 

Exemple : un artisan vend à un repreneur son entreprise individuelle pour une valeur de 350.000 €. Cet artisan dégage à cette occasion une plus value à long terme de 100.000 euros.

Le taux d’exonération sera ainsi de : 500 .000 – 350.000 / 200.000 = 0,75.

Le montant de la plus value exonérée sera donc de : 100.000 € X 0,75 = 75.000 € (soit une plus value restant imposable de 25.000 €).

 

Existent t-ils d’autres conditions ?

 

En cas de transmission à titre onéreux, le cédant ne doit pas détenir directement ou indirectement plus de 50% des droits de vote ou des droits dans les bénéfices sociaux au sein de l’entreprise cessionnaire. De la même façon, la loi continue d’exiger que le cédant n’exerce aucune fonction de direction, de droit ou de fait, dans l’entreprise cessionnaire. Précédemment, il convient cependant de préciser que l’administration autorisait néanmoins le cédant à être salarié du cessionnaire sous réserve qu’il exerce ses fonctions dans un véritable état de subordination vis à vis des dirigeants de l’entreprise.

 

L’ensemble de ces conditions tenant à l’absence de lien entre le cédant et le cessionnaire est exigé au moment de la transmission mais également dans les 3 années qui suivent.

Deux nouveautés méritent cependant d’être soulignées à ce sujet :

  • les parts détenues par des membres du cercle familial (conjoint, ascendant, descendant, frères et sœurs) ne sont plus prises en compte pour l’appréciation du contrôle du cessionnaire. Ainsi, un entrepreneur pourra désormais vendre, tout en bénéficiant de la présente exonération, son activité à la SARL que contrôle son fils et détenir une participation minoritaire dans cette société à condition qu’il n’en assure pas la direction effective.
  • Il est tenu compte désormais du contrôle d’un associé majoritaire du cédant sur la structure cessionnaire. Une société ne pourra pas bénéficier de l’exonération si elle cède à une autre société contrôlée par le même associé.

 

Pour conclure, il est important de préciser que cette exonération ne pourra se cumuler avec un autre régime de report d’imposition ou d’exonération des plus values professionnelles, sauf pour les régimes d’exonération des plus values professionnelles en cas de départ à la retraite, et d’abattement pour durée de détention.

 

Par conséquent, le contribuable qui procède à la transmission de tout ou partie de son activité professionnelle aura plus que jamais intérêt à se faire assister par un conseil expérimenté afin d’être particulièrement vigilant sur le meilleur régime fiscal dont il pourra bénéficier en fonction des circonstances particulières de l’opération et de la taille de sa propre entreprise.

 

 

Gauthier d’HELLENCOURT

Avocat

Février 2006